MATERIATEK

Lorsqu’un studio d’architecture intérieure décide d’investir son propre espace, non pas un lieu loué, mais un endroit volontairement choisi, restauré et façonné selon ses besoins, une mission d’un tout autre ordre commence à prendre forme.

Notre aventure avec Materiatek est née de cette décision : l’acquisition, en 2020, d’un ancien bâtiment industriel à Molenbeek, destiné à être transformé en espaces de travail capables à la fois de définir notre studio et de soutenir son évolution.

Dès les premières esquisses et intuitions, il est apparu clairement que l’espace devait devenir bien plus qu’un simple lieu de travail. Plus vaste que ce dont nous avions besoin, il révélait un potentiel qui dépassait largement ses murs : un lieu capable d’impliquer, de relier et de stimuler de nouvelles dynamiques au sein du quartier et de sa communauté.

À travers un processus participatif fait d’ateliers internes et de conversations avec les voisins, d’autres designers, l’administration locale et les partenaires du chantier, Materiatek a progressivement pris forme.

Nous en avons défini la mission : une plateforme indépendante dédiée aux matériaux, au design et aux interactions humaines, un outil vivant au service de la communauté créative.

Puis nous sommes passés à l’action, transformant les idées en formes, en textures et en un espace habité.

Le bâtiment industriel centenaire, autrefois rattaché à l’historique Brasserie Van Malder, a été transformé avec soin en un espace moderne et multifonctionnel qui établit un dialogue harmonieux entre patrimoine et innovation.

La rénovation met en valeur le caractère industriel du lieu tout en introduisant une dynamique spatiale résolument contemporaine. Les interventions structurelles — notamment le remplacement complet de la toiture et la démolition partielle de certains planchers — permettent à la lumière naturelle de pénétrer profondément dans le bâtiment et créent des circulations fluides. Parallèlement, les surfaces d’origine, les jonctions apparentes et les imperfections visibles sont préservées dans un esprit d’honnêteté architecturale.

Chaque paire d’étages du bâtiment assume une fonction distincte.

Le rez-de-chaussée et le premier étage accueillent la matériauthèque et l’espace de coworking. De hauts rayonnages en acier galvanisé courent le long des murs en briques brutes et se combinent avec de grandes tables communes destinées à la collaboration, à la consultation de matériaux et au travail partagé. Ces espaces sont complétés par des salles de réunion entièrement équipées ainsi que par des booths individuels.

Plus haut, les deuxième et troisième étages s’articulent autour de la « Set », un espace central en double hauteur, polyvalent et structurant. Il organise la circulation et accueille diverses typologies de travail, tout en pouvant évoluer aisément d’un lounge informel quotidien vers une configuration adaptée aux conférences, ateliers ou événements.

Au dernier niveau, une cuisine généreuse s’ouvre sur une nouvelle terrasse, accompagnée d’espaces de travail flexibles et de zones de support.

L’architecture adopte une attitude discrètement affirmée : brute, maîtrisée et généreuse. Des teintes neutres et des finitions minimales laissent toute la place aux personnes, aux processus et aux matériaux.

Dès le départ, l’intention du projet était de révéler et de mettre en valeur les caractéristiques essentielles du bâtiment : murs en briques apparentes, poutres et colonnes métalliques, plafonds voûtés et grandes ouvertures sur les deux façades. La restauration renforce cette esthétique industrielle grâce à des éléments fonctionnels cohérents, tels que des sols en béton chauffant, des étagères en métal brut s’élevant dans les doubles hauteurs, ainsi que de vastes rideaux qui offrent non seulement une flexibilité spatiale mais aussi des performances acoustiques et une présence scénographique marquée.

L’éclairage a été pensé avec la même exigence. Des luminaires décoratifs dialoguent avec des dispositifs techniques avancés pour les plans de travail et les zones dédiées au conseil en matériaux. Par ailleurs, la lumière naturelle circule librement grâce à une organisation volontairement poreuse qui encourage le mouvement, la visibilité et les rencontres spontanées.

La circularité constitue le cœur de l’ensemble du projet. L’espace intègre un revêtement mural en bois UNILIN entièrement recyclé, des carrelages et du mobilier sourcés auprès de Rotor, ainsi que des collaborations avec des designers locaux, notamment HIER pour les étagères sur mesure et Sonian Wood pour les surfaces de travail. Chaque détail est intentionnel, façonné avec un soin égal pour ses utilisateurs et pour l’écosystème qui les soutient.

Materiatek repose sur trois piliers intimement liés : une matériauthèque soigneusement sélectionnée, un espace de coworking et une programmation d’événements en constante évolution.
Ces fonctions ne sont pas des entités séparées mais des interfaces fluides.
Les professionnels viennent y travailler et restent pour l’échange.
Les étudiants y trouvent de nouveaux outils et reviennent en tant que contributeurs.
Les habitants du quartier passent par curiosité et deviennent partie prenante du lieu.

Aujourd’hui, Materiatek fonctionne comme une association indépendante (ASBL).
Elle constitue une infrastructure physique et sociale dédiée à la découverte partagée, une plateforme neutre pour l’innovation, l’expérimentation, l’éducation et un dialogue authentique entre industrie et pratique.

Nous avons participé à chaque étape du processus, depuis les premières idées jusqu’aux détails de l’exécution. Nous avons contribué à façonner non seulement la forme du lieu mais aussi sa mission. Les défis rencontrés en naviguant entre le rôle de maître d’ouvrage et celui d’architecte ont été autant d’occasions d’apprentissage.

Plus d’un an s’est écoulé depuis notre installation. Nous avons vécu dans l’espace, testé ses usages, développé de nouvelles habitudes, ajusté nos routines. Alors que nous continuons à affiner les détails et à explorer le quartier, nous constatons que nous devenons progressivement une composante de l’écosystème que nous avons contribué à faire émerger.